https://christo-renn.com Sarkozy,le financement libyen
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Muammar al-Kadhafi et Nicolas Sarkozy, le 10 décembre 2007 à l'Elysée. Photo Eric Feferberg. AFP

«Mediapart» révèle un nouveau document de 2007 mentionnant le versement de 6,5 millions d’euros de Tripoli à la campagne de Sarkozy Les millions libyens refont surface
Une pièce de plus dans le jukebox, cette entêtante musique libyenne planant sur le financement de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2007. Mardi, Mediapart a exhumé un nouveau document écrit faisant état de la sollicitude de feu le colonel Khadafi : un carnet de Choukri Ghanem, Premier ministre libyen (2003-2006) puis ministre du Pétrole (2006-2011). Il y indique avoir transféré 1,5 million d’euros à l’équipe Sarkozy et mentionne deux autres versements via des dignitaires du régime khadafiste, portant le total à 6,5 millions d’euros.
En mai 2012, dans l’entre-deux tours, Mediapart avait déniché une précédente note écrite, sous la plume de Moussa Koussa, ancien patron des services secrets libyens, faisant état d’une «approbation d’appuyer sa campagne électorale pour un montant de 50 millions d’euros». Ce document-là (rédigé en décembre 2006, quelques mois avant la présidentielle) avait fait polémique : il ne s’agissait que d’une intention de financer Sarkozy, le montant envisagé dépassant amplement le plafond de dépenses électorales autorisées (20 millions). Mais ce document-ci, rédigé en avril 2007, au cœur de l’élection, évoque un passage à l’acte, pour des montants bien moindres mais plus conformes.
Danube. Cela ne constitue pas encore une preuve, mais alimente un peu plus les soupçons. Jusque-là, il fallait se contenter de déclarations orales d’anciens dignitaires libyens, légitimement aigris d’avoir été renversés à l’été 2010 par une opération militaire diligentée par la France, réservant un chien de leur chienne à Nicolas Sarkozy. Comme Saïf al-Islam, fils de Muammar al-Khadafi, depuis emprisonné en Libye : «C’est nous qui avons financé sa campagne, nous en avons les preuves et sommes prêts à en révéler tous les détails», avait-il dit en mars 2011. Ou Baghdadi al-Mahmoudi, ancien Premier ministre lui aussi détenu sur place : «J’ai supervisé le dossier du financement de la campagne de M. Sarkozy. Des fonds ont été transférés en Suisse.» Ou encore Moftah Missouri, ancien traducteur de Khadafi, confessant à l’émission Complément d’enquête : «Kadhafi m’a dit verbalement que la Libye lui avait versé une vingtaine de millions.» Même le premier président de la Libye post-kadhafiste, Mohamed el-Megarief (2012-2013), y est allé de sa petite musique: «Oui, Khadafi a financé Sarkozy et a continué de le faire jusqu’en 2009.»
Tant qu’il s’agissait de témoignages oraux, Sarkozy pouvait plastronner : «C’est grotesque ! S’ils avaient financé ma campagne, je n’aurais pas été très reconnaissant…» L’ex-président avait contesté l’authenticité du premier document écrit par Moussa Koussa, portant plainte contre Mediapart, non pas pour diffamation mais pour faux… Il s’est fait bananer en juin sur ce point, sa plainte s’achevant par un non-lieu. Bis repetita avec le carnet de Choukri Ghanem ?
Si rien n’est certain à ce stade, les témoins d’un éventuel financement ont connu quelques revers de fortune. Koussa, un temps exfiltré au Qatar, pays ami de la sarkozie, a depuis fait machine arrière sous la menace d’une extradition en Libye. Mahmoudi, un temps arrêté en Tunisie, selon lui «à l’instigation du président français afin que le financement de sa campagne ne soit pas dévoilé», a été extradé vers la Libye après avoir refusé de revenir sur ses propos. Ghanem, réfugié en Autriche, est lui décédé en 2012, par noyade dans le Danube - suicide ou meurtre, la question reste ouverte. Lui ne risque plus de parler, mais ses carnets, après un détour par la Norvège dans le cadre d’une affaire de corruption visant l’industrie chimique, ont fini par être transmis à la justice française.
Barnum. Le grand sachant de tout ce barnum franco-libyen fait l’objet de toutes les attentions. Bachir Saleh, argentier du régime Khadafi, à la tête d’un important fonds d’investissement libyen, est bien vivant et toujours en liberté. Un temps réfugié en France sous la présidence Sarkozy, une bonne escorte garantissant son silence, il sera brusquement exfiltré en pleine campagne présidentielle 2012, sur fond(s) de premiers soupçons libyens. A la manœuvre, Bernard Squarcini, alors omnipotent à la tête de la DCRI mais plus pour longtemps (lire ci-dessus), et Alexandre Djouhri, homme à tout faire de la chiraquie puis de la sarkozie. Destination Afrique du Sud, où il tâche de ne plus faire parler de lui. Et encore moins de parler de Sarkozy.
Renaud Lecadre
Sarkozy et l'argent libyen: des primes en "cash" dans le viseur des enquêteurs
Par LEXPRESS.fr le
Le député LR Eric Woerth, ancien trésorier de la campagne de Nicolas Sarkozy en 2007, a de nouveau été entendu par les enquêteurs chargés de l'affaire du possible financement libyen.
afp.com/CHRISTOPHE ARCHAMBAULT
Les policiers ont interrogé début mai plusieurs proches de Nicolas Sarkozy, dont Éric Woerth, dans l'enquête sur le financement libyen présumé de sa campagne de 2007.
A défaut d'avoir retrouvé des preuves de versements occultes émanant de la Libye, la justice tente de déterminer ce que serait devenu cet argent. Les juges d'instruction chargés de l'enquête sur le possible financement libyen de la campagne 2007 de Nicolas Sarkozy ont demandé début mai l'audition de plusieurs proches de l'ex-chef de l'État, rapporte ce samedi Mediapart.
D'après le site d'investigation, Eric Woerth, trésorier durant cette période, a été entendu sous le statut de "suspect libre" par les enquêteurs anticorruption. D'anciens employés affectés à la campagne ont quant à eux été placés en garde à vue. Ils ont également vu leur domicile perquisitionné.
Des compléments de salaires en liquide
Les policiers s'intéressent à une série de primes en liquide versées aux salariés en tant que compléments de salaire après l'élection. Ils se demandent si cet argent "cash" ne provient pas des fameuses "valises d'argent libyen" que Zied Takkiedine, sulfureux homme d'affaires, affirme avoir remis à Nicolas Sarkozy et Claude Guéant entre 2006 et 2007. L'existence de ces fonds n'a toutefois jamais été prouvée.
Eric Woerth et plusieurs employés ont confirmé l'existence de ces primes en liquide mais le premier a démenti tout lien avec un financement étranger. Contestant toute irrégularité dans les comptes de campagne, le député Les Républicains de l'Oise aurait toutefois reconnu, selon Mediapart, que cette trésorerie était tellement abondante qu'il s'est demandé s'il ne fallait pas "brûler les billets".
"Des liasses de billets de 10, 20 et 50 euros"
Le site d'investigation révèle le témoignage d'un employé de la campagne de Nicolas Sarkozy, affecté à la cellule communication. Ce dernier aurait déclaré aux policiers que ses fiches de paie ne mentionnaient qu'une infime partie de son salaire. Il recevait le reste en espèces. Aux enquêteurs, il a décrit une "armoire" où était entreposée "des liasses de billets de 10, 20 et 50 euros".
Ces "avances" pouvaient s'élever à plusieurs milliers d'euros, selon les employés interrogés. Dans une enquête publiée en novembre 2016, Le Monde affirmait que la justice avait accumulé de "nombreux indices" accréditant la piste d'un financement de la campagne de 2007 par le régime de Kadhafi mais pas de preuve définitive. Les juges d'instruction disposent d'au moins sept témoignages accablants mais ils restent invérifiables en l'état.